Comme d’habitude, toute expédition digne de ce nom apporte son lot de peines et de pannes.

La première est en fait de ma faute : j’ai cassé l’antenne du transpondeur pendant les manoeuvres de chargement du conteneur. Pas de souci, j’ai le rechange.

La seconde aurait pu être catastrophique mais ma bonne étoile veillait sur moi ce soir-là. Alors que nous opérions depuis l’aéroport international car notre piste était en réparation, alors que je coupe l’axe la 11/29 par l’ouest au retour d’un baptême de l’air sans conditions permettant de rester en vol, le contrôleur me demande si je peux me poser à contre QFU (piste 11) car il avait un avion de ligne en arrivée et son temps estimé était le même que celui nécessaire pour moi en faisant un circuit complet au QFU 29, et comme la planeur a la priorité,  il souhaitait éviter de lui faire faire un circuit d’attente. Aucun problème le vent est faible, j’accepte. J’envisage donc de me poser court et tenter un virage à 90° pour dégager immédiatement au grand parking, avec assez de vitesse pour que la gouverne de direction soit encore efficace et un coup de frein sec pour soulever la roulette arrière. Manoeuvre appliquée couramment pour sortir des pistes en dur. Seulement voilà, au moment de l’application simultanée du frein et de la gouverne de direction, le circuit hydraulique lâche brutalement et me voilà parti à 80 km/h à 20° de l’axe de piste, sortant miraculeusement entre deux balises lumineuses, passant de l’asphalte au mélange sable et cailloux après un saut d’une vingtaine de centimètres, sans rien casser. Mais je suis tout proche de la bande d’asphalte de la piste, il me faut absolument dégager d’une dizaine de mètres, les phares d’atterrissage de l’Airbus sont déjà visibles. Je me jette hors de l’habitacle en sortant le moteur, mis en route et plein gaz pour roulage difficile dans le sable sur une dizaine de mètres et l’Airbus nous passe au ras des moustaches, pour le plus grand plaisir de ma baptisée ! Une fois l’Airbus au parking, tout le personnel valide de l’aéroport s’est précipité sur le Nimbus pour le sortir du sable et le remettre sur la piste sans rien casser, puis sur une plate-forme isolée pour réparations. Le tuyau hydraulique, changé par un atelier agréé EASA Part M145E en juillet 2009, touchait légèrement le pneu et avait fini par éclater !

Je passe sur les miracles des mécaniciens Patagoniens qui, en récupérant la moitié des raccords terminaux et en les ressoudant sur d’autres moitiés au standard argentin nous ont permis de voler 48 heures plus tard. Vous avez dit EASA Form One ? Il vaut mieux en rire!

La troisième est allemande ! Fin novembre, dans l’espoir de trouver un peu plus de vent, le groupe des Allemands de Chapelco déménage à Esquel, 200 km au sud. C’est un mauvais choix et le 23, ils décident de remonter à Chapelco mais le moteur du Ventus de Diether Memmert ne démarre pas ! Par chance pour lui le club de Bariloche possède une remorque et le 24 novembre au soir le planeur est devant notre atelier. Connecteurs de bobines brûlés, pas de souci, j’ai les pièces et j’en ai déjà changé douze!

La quatrième est aussi un cadeau de mon ange gardien : le 13 décembre, quatre minutes après le décollage, le moteur perd brutalement 2500 rpm. Message de détresse, quelques secondes pour vérifier que l’essence, les gaz et le contact sont bons, et comme le moteur tourne régulièrement mais à seulement 4000 tours, le taux de chute est tout à fait compatible avec un retour au terrain, dont acte.
Diagnostic: casse de la goupille élastique de liaison entre les deux carburateurs.

Ce moteur (le troisième en 12 ans!) n’a que 105 heures. Le constructeur a « oublié » de prévoir un ressort de rappel en position ouverte du papillon du carburateur « esclave » en cas de rupture de la liaison. Bien évidemment on me répond que je suis le premier à qui cela arrive (air connu, mais je sais que c’est faux!), que l’on va me donner une solution définitive rapidement, que j’attends encore…. L’achat d’un chasse goupille de 2 mm et le remplacement (vous avez dit Form One ?) seront terminés dans l’après-midi, coût 2 €, risque 250.000 € et la vie de deux personnes. Trois minutes plus tôt et nous étions dans les arbres ou dans le lac. Toujours pas de AD ni simplement de note d’information de la part du constructeur. C’est un scandale, mais j’ai quand même prévenu les copains ayant le même moteur.

La cinquième est du déjà vu, et pourtant sur une pièce neuve (avec Form One): rupture de l’une des deux ailettes de maintien du pot d’échappement. Découverte lors de la visite post-vol (beaucoup plus importante que la visite pré-vol car permet d’anticiper les réparations), et réparée en quelques minutes par Gringo, le roi du TIG, qui nous avait déjà sauvé il y a quelques années lors de la rupture du ressort de maintien du levier de commande des aérofreins. Vous avez dit EASA Part 145M ?

La sixième est aussi du déjà vu et commence à m’énerver puisqu’il s’agit de l’explosion au sol de la chambre à air (montée neuve en septembre). Lorsque cet incident se produit, le planeur est alors totalement immobilisé sur le lieu de la crevaison, sauf accepter de détruire le moyeu et le disque du frein. Le changement de roue doit être effectué sur place ce qui impose de disposer d’un cric d’une tonne et du berceau du fuselage, ou faire appel à une grue.

Le problème est que le constructeur fournit (avec Form One) des chambres de cinq pouces pour un pneu de six pouces, lequel pneu est prévu pour une charge maximale de 730kg  alors que le planeur est certifié à 820kg plus les accessoires de sécurité et de Patagonie plus le facteur de charge à l’atterrissage. J’ai finalement trouvé à Buenos Aires une chambre ad hoc qui remplit parfaitement cette fonction (sans Form One)!