Jean-Pierre interroge la DGAC et obtient l’autorisation d’utiliser son Stemme sur l’aéroport de Calama (photo) pour le mois de novembre (latitude 22°S, juste au-dessus du tropique du Capricorne), la piste de San Pedro (photo) n’étant pas suffisamment sécurisée, l’idée étant de voler en thermique pendant un mois sur les volcans avec env. 50 min de moteur (110 km) pour y arriver. Le projet prévoyait ensuite de descendre mi-décembre dans le sud du Chili à Balmaceda (latitude 46°S) pendant un mois pour y voler en onde. Cet endroit est sans doute le meilleur de toute la Cordillère, et se trouve en territoire chilien. L’aéroport de Balmaceda étant en réfection, ce sera Chile Chico, de l’autre côté du lac, non contrôlé, déjà utilisé par Jean-Marc Perrin.

Le projet se précise, le budget aussi, j’achète les billets d’avion, lance le mailing aux habitués et les communications dans la presse spécialisée. Juin 2019, c’est parti pour novembre à Calama et décembre à Balmaceda/Chile Chico !

La piste de San Pedro de Atacama, altitude 2.400 m, longueur 2 km, en plein désert, aucune sécurité, aucun service. Le puits municipal N°3 est visible sous l’aile. En cette période de troubles sociaux, y stationner serait trop risqué, nous choisirons Calama.

Au parking totalement sécurisé de Calama, en bonne compagnie. Mais pas d’AVGAS!

Passage par le contrôle de sécurité comme tout passager, avec carte d’embarquement spéciale donnée par la DGAC après approbation du plan de vol. Totalement acceptable au vu de la situation sociale. Accompagné par mon pilote « légal », un jeune breveté solo depuis 6 mois et 40 heures de vol, ce sera l’occasion de sa vie !

Les intentions de participation arrivent très vite, en septembre j’ai déjà 24 candidats, moitié pour les thermiques d’Atacama sous les tropiques, moitié pour l’onde vers le pôle sud.

Première inquiétude, le Stemme n’a pas encore ses papiers, après deux ans d’attente et de paperasseries. Le dernier problème étant que la société qui a construit la machine a changé de raison sociale, de Stemme Gmbh à Stemme AG. Pour les bureaucrates chiliens, c’est trop compliqué, des mois sont perdus. Finalement, les papiers arrivent deux mois avant notre départ. Course contre la montre pour préparer la machine, installer l’oxygène, les instruments de navigation, entraîner les pilotes, et surtout faire décoller la machine d’une piste en terre de 500 m de longueur près de Valparaiso, ce qui n’était pas gagné, selon un célèbre possesseur de S10 Limbach. Soupir de soulagement, ça décolle bien, même avec 2 pilotes à bord et le minimum de carburant.

Vu le nombre de participants, il me faut trouver un autre planeur. Un pilote de Vitacura accepte de nous louer son Arcus M, bonne nouvelle. Mais au moment de concrétiser, à la question « assurance ? », la réponse me glace le dos : « aucune, même pas de RC, cela n’existe pas au Chili ». Je lance des appels d’offres dans tous les pays du monde, jusqu’en Russie, rien à faire. Lloyd’s ne souhaitant pas couvrir le risque Chili, les autres ne suivent pas. À trente jours du départ, il faut se rendre à l’évidence : nous n’aurons aucune forme d’assurance.

Abandonner ? Pas encore. La solution pour voler serait d’avoir un pilote chilien comme Commandant de Bord officiel, légalement responsable. Ce qui double le coût des vols et réduit l’intérêt pour ceux qui souhaitaient voler avec moi. Beaucoup se désistent, la participation de l’Arcus est annulée. Je dois aussi annuler la deuxième partie vers le Sud car le vol en onde se déroulant intégralement en Argentine, il apparaît inutile de risquer un atterrissage dans ce pays sans avoir au moins une assurance RC, ce serait le retour assuré par camion sans compter les tracasseries administratives. Nous passerons deux mois supplémentaires à faire du tourisme andin.

Je devrai en plus assurer le gîte et le couvert à quatre pilotes chiliens et leur payer les billets d’avion. Le propriétaire du S10 accepte de nous laisser sa machine en prenant lui-même le risque casse moyennant une prime substantielle, qui double le coût prévu. Par chance, le planeur rentrera indemne au bercail, tout comme la camioneta du propriétaire, elle aussi dépourvue de toute forme d’assurance.

Pour les quelques européens passionnés encore décidés, c’est une douche froide, en fait c’est moi qui supporterai ce surcoût moyennant un ou deux vols dans la semaine. Encore un bilan dans le rouge profond…

Le retour avant la nuit, donc vers 19h, correspondait aux heures de pointe et l’insertion dans les procédures IFR n’était pas toujours simple, mais bien acceptée par tous.